#137 • Highland Park 18 ans

43% alc./vol.
Distillerie Highland Park, Kirkwall, Orkney, Écosse

Je me suis gardé un petit plaisir en guise de dernière mignonnette américaine à déguster, un des kings de l’équilibre et de la complexité, le Highland Park 18 ans.

La distillerie fait aujourd’hui partie du groupe Edrington, ce qui explique la présence de malt Highland Park dans la confection du Famous Grouse.

Ayant déjà parlé de la distillerie dans plusieurs articles précédents, à part vous répéter que c’est la plus au nord des distilleries écossaises, il ne reste plus tant de détails succulents à rapporter. Je vais donc me rabattre sur l’histoire de Magnus Eunson, le fondateur de la distillerie, racontée sur leur site officiel.

À la fin du 18e siècle, Magnus Eunson était bedot de jour et contrebandier de whisky la nuit, bien installé dans sa maison sur High Park, à Kirkwall, à l’endroit où est érigée aujourd’hui la distillerie Highland Park. La légende dit qu’il faisait preuve de beaucoup d’imagination et d’audace pour passer son whisky sous le nez des collecteurs de taxes.

Une de ses planques à whisky préférées était en-dessous de sa propre église. Un soir, les collecteurs du gouvernement eurent vent de l’endroit où se trouvait son magot secret et décidèrent de faire une perquisition à l’église. Ayant été prévenu avant, Magnus eut le temps de ramener tous ses tonneaux chez lui. Il les disposa au centre de sa maison, mis des planches de la dimension approximative d’un cercueil par-dessus, et recouvra le tout avec des draps blancs. Il commença alors à chanter une messe funèbre entouré des ses amis. N’ayant rien trouvé à l’église, les percepteurs débarquèrent alors chez Eunson. Voyant le spectacle, ils restèrent figés dans le cadre de la porte, alors qu’un ami de Magnus leur chuchota à l’oreille « Ils sont morts de la variole ». On ne revit pas ces hommes du gouvernent de sitôt.

Magnus est le sujet de bien d’autres légendes, mais je vais m’en garder un peu pour d’autres critiques sur d’autres expressions de la distillerie.

Comme le disait si bien le comédien et arbitre de notre bonne vieille LNI, Yvan Ponton:

Je suis fier de payer des impôts. La seule chose c’est que je pourrais être tout aussi fier avec seulement la moitié de la somme.

Couleur sherry, muscat, brun-roux, marron clair et j’en passe.

Nez:
Miel, beurre salé et réglisse noire. Un peu de cerise et de citron, avec une note de cuir fumé en-dessous. Complexe et raffiné, doux et séduisant. Touche de pruneau et de cannelle, pas les marionnettes.

Bouche:
Juteux et doux au début grâce à des notes fortes de miel, de citron salé et de bois de chêne. Pommes, caramel et sucre d’orge apparaissent avant d’être balayés par une vague poivrée.

Finale:
Les saveurs expérimentées jusqu’ici s’estompent sur un lit de cuir salé qui se transforme en gingembre mielleux et en cacao à peine tourbé.

Équilibre:
Complexité à tout casser. Un incontournable pour toute armoire à whisky qui se respecte. Je crois que tout ce qui lui manque c’est un peu plus de mordant. Je suis certain qu’à 46% d’alcool il exploserait encore plus.

Note: ★★★★★

#129 • Isle of Jura 10 ans

43% alc./vol.
Distillerie Jura, Île de Jura, Écosse

Prochaine mignonnette au menu, le Isle of Jura 10 ans, connu aussi sous le nom de Isle of Jura Origin.

Ah, la mystérieuse Île de Jura. Sa distillerie éponyme y fut fondée en 1810 sous le nom de Small Isles Distillery, bien que comme presque partout en Écosse, du whisky s’y produisait bien avant. Plusieurs changements de propriétaire et de nom plus tard, elle fut fermée en 1901, avant de réouvrir en 1960 sous le nom de Jura et sous la tutelle de Whyte and Mackay Ltd. Ils ont en 2007 été achetés par l’entreprise indienne United Spirits Limited (aucun lien avec Amrut), pour à leur tour en novembre dernier (2012) être engloutis par le géant Diageo.

Même si l’île de Jura est géographiquement très proche du continent écossais, il n’en demeure pas moins un exploit de s’y rendre. On doit prendre l’avion jusqu’en Islay, la plus grande île d’Écosse, et ensuite prendre le ferry de Port Askaig jusqu’à Jura. Si vous visitez la distillerie, on vous donne à vie un verre de whisky gratuit par mois, pourvu que vous soyez sur place pour le consommer.

Comme le disait si souvent l’explorateur russe Pyotr Kozlov (1863-1935):

Les touristes, en général, se renseignent auprès des autres touristes, qui ne connaissent guère mieux leur chemin. Cela complique toujours tout. Surtout quand on ne parle pas la même langue.

Couleur or, ou bien sherry à peine bruni.

Nez:
Légère vanille, citron sûrette, infime fond de tourbe. Pin et sel de mer gros comme le bras, de quoi se croire au large même de Jura.

Bouche:
On commence avec des canneberges, pour ensuite être frappé par le pin avant de finir sur le citron. Miel, épices et malt. Très sec.

Finale:
Sèche et raisonnablement longue sur des notes de chocolat huileux et d’iode.

Équilibre:
Pour le prix, c’est de la bombe. En-dessous du Diurach’s Own, mais au-dessus du Superstition.

Note: ★★★★★