#093 • Canadian Club Classic 12 ans

40% alc./vol.
Hiram Walker & Sons Limited, Windsor, Ontario, Canada

C’est le moment de s’attarder sur un petit whisky bien de chez nous, venu tout droit du bas de la pyramide, pour souligner la Journée de la Confédération. Tout le monde connaît bien le Canadian Club, ou CC dans certains cercles, mais bien peu de gens savent qu’en réalité, il n’est même pas tout à fait originaire du Canada.

C’est en 1858 que Hiram Walker fonda sa distillerie à Detroit, au Michigan. À l’époque, son whisky était vu comme révolutionnaire car il était vieilli un minimum de cinq ans, alors que les autres expressions américaines l’étaient moins d’un an. Il était alors tout simplement connu sous le nom de Club Whisky, car ce n’était que les membres de clubs de péteux qui le consommaient. C’est l’arrivée imminente de la Prohibition qui poussa Walker à déménager sa distillerie peu après pour s’établir finalement à Windsor en Ontario.

Vers la fin du 19e siècle les distilleries américaines, voulant freiner la popularité du Club Whisky, insistèrent pour que la bouteille porte la mention « Canada » pour le différencier de leurs propres whiskys. Cela n’a eu pour effet que de mousser sa popularité, le bon vieux Canadian Club étant maintenant un produit « exotique » aux yeux du consommateur américain moyen. Pendant les années de la Prohibition, on dit même que le bandit notoire Al Capone fut l’un des plus gros clients de Canadian Club, passant soi-disant des milliers de caisses sous le nez des douaniers américains.

L’expression de base du CC, appelée Premium, est la plus populaire de nos jours et est vendue dans plus de 150 pays. Elle sert souvent de blender pour les cocktails. Mais ce n’est pas celle sur laquelle nous nous arrêterons aujourd’hui. Dans un esprit d’ambition je vise une coche au-dessus et je vous présente le Canadian Club Classic 12 ans qui a baigné dans des barriques de chêne blanc neuves pendant, comme l’indique son nom, douze ans.

Comme le disait si souvent feu l’ex PM Pierre Elliot Trudeau:

Jamais je ne voudrais faire partie d’un club qui accepterait de m’avoir pour membre…

D’une couleur aussi cuivrée que feu la cenne noire fraîchement frappée, plongeons dans le vif de la dégustation.

Nez:
Sucré, vanillé, plutôt herbeux et fermé. Une touche de colle à bois essaie de percer. Aucun rye en vue.

Bouche:
Une sorte de magie insolite s’opère. À peine huileux, rayon de miel avec une bonne dose d’épices. Sirop d’érable dilué, mais différent du Sortilège.

Finale:
Très courte. un tout petit peu de vanille et de raisin qui se volatilisent en criant lapin.

Équilibre:
Tout se passe en bouche. Un bel effort mielleux. Prix justifié. Excellent choix quand on est pas assez sûr d’être remis d’un rhume pour boire des trucs plus ruineux.

Note: ★★★★★

#036 • Alberta Premium Dark Horse

45% alc./vol.
Alberta Distillers, Calgary, Alberta, Canada

Pour ouvrir la dégustation « Whiskies d’ici et d’ailleurs » du 12 mars dernier, lumière sur le Alberta Premium Dark Horse. Beaucoup de gens autour du monde ont encensé d’autres expressions Alberta Premium, et le Dark Horse a été le coup de coeur de l’assemblée ce soir là. Fait intéressant rapporté par le Club de Scotch Whisky de Québec, la règlementation sur les whiskys canadiens permet l’ajout d’ingrédients divers pour altérer la saveur jusqu’à concurrence de 9.09%. Grâce à cette permission cette expression contient, et ce légalement, 8% de bourbon et 0.5% de sherry.

Même s’il ne sont vieillis que cinq ans, les whiskys Alberta Premium ont assez de caractère et de complexité pour avoir mérité le titre de « Canadian Whisky of the Year » dans les Whisky Bibles 2006, 2007, 2008 et 2009 de Jim Murray.

Étant donné que c’est le second whisky d’affilée que je déguste dans l’ombre des idées préconçues, je devrai faire preuve de prudence et d’objectivité.

Sa couleur est d’un orange syrupeux, voire même de bière rousse, et il est composé à 100% de grain de seigle. Difficile de résister à l’attrait d’un bon vieux rye canadien.

Nez:
Vanille mielleuse, seigle torréfié, caramel, un peu de bois brûlé, fruits des champs. Une touche d’érable mais si subtile que j’en suis à me demander si ce n’est pas encore ma fibre fédéraliste qui me joue des tours. Je le laisse s’ouvrir pour découvirir de la barbe à papa à la deuxième visite. Riche, entier, je dirais même distingué.

Bouche:
Sucré, crémeux, vanillé, toffee, épices, seigle grillé, lavande, gingembre et dattes. D’une douceur et d’une complexité qui nous font aisément sourire.

Finale:
Inépuisable, le sucre reste en bouche, main dans la main avec les épices du seigle. Juste assez suave.

Équilibre:
J’en veux plus encore. D’une ahurissante complexité pour un rye. Je voudrais dire encore doux, mais c’est plus que ça, le seul mot qui me vient en tête vient de l’anglais smooth. Lisse, non. Doux, non. Fluide, non. Disons que c’est un whisky doté d’une grande finesse, mais je ne suis pas entièrement satisfait de ce descripteur non plus. Je vais en ce cas laisser en guise de clôture la parole à une légende de l’ouest canadien, Wayne Gretzky:

On pogne pas les mouches avec du vinaigre…

Note: ★★★★★